La notion de groupe en mathématique

CERTAINS d'entre nous se souviennent peut-être des ensembles de nombres N, Z, Q, R, et peut-être du lien qu'ils entretenaient avec la notion de groupe, certainement introduite un peu trop vite.

2017.09.01 - premier jet

Résoudre une équation

Si je définis l'ensemble des naturels N comme comprenant tous les nombres entiers positifs {0, 1, 2, 3, 4…}, je peux vouloir résoudre l'équation

x + 3 = 5

qui signifie: quel est le nombre (x) auquel j'ajoute le nombre naturel 3 pour obtenir le nombre 5?

Pour un cas aussi simple, l'intuition suffit: on «sent» en général qu'en ajoutant 2 à 3, on obtient 5.

Si l'on hésite, on peut se dire qu'une équation est une égalité (comme une balance où le plateau de gauche doit toujours égaler celui de droite. On sait que l'on peut conserver l'égalité en ajoutant, ou en enlevant, la même quantité à gauche et à droite. En l'occurrence, enlever la quantité 3 de part et d'autre permet de simplifier et même résoudre l'équation.

De ce fait, si l'on remplace x par 2 dans l'équation initiale, on se convainc que l'égalité est respectée:

Cela dit, les équations n'utilisant que les nombres entiers positifs n'obtiennent pas nécessairement une réponse:

ne fournit pas de réponse dans l'ensemble des nombres naturels, car la technique utilisée ci-dessus fait aparaître un nombre négatif:

Une nécessaire formalisation

L'équation dans N a donc fait apparaître un nombre négatif, qui n'appartient pas à l'ensemble des nombres naturels positifs. Il a donc fallu considérer un nouvel ensemble, appelé Z incluant les nombres entiers négatifs {… –4, –3, –2, –1, 0, 1, 2, 3, 4… }.

Afin de ne pas confondre le signe négatif et le symbole de la soustraction, nous allons utiliser le surlignement pour les nombres inférieurs à 0:

Z = { … 4, 3, 2, 1, 0, 1, 2, 3, 4… }

Les équations précédentes et leur résolution s'écrivent alors (5 + 3 équivaut à 5 – 3):

La résolution de la seconde équation n'appartient pas à l'ensemble N, seulement à Z.

Ces deux exemples (il en existe une infinité d'autres) montrent qu'il y a un avantage à également considérer les nombres négatifs, et peut-être de se passer de l'opération «soustraction».

Des mathématiciens ont tenté de considérer les conditions de résolution des équations et ont montré qu'il fallait pour cela qu'une opération dans un ensemble devait vérifier quatre propriétés. L'addition dans l'ensemble des entiers (Z,+):

  1. est interne et partout définie: quels ques soient deux éléments de Z, l'addition de ces deux éléments donnent un élément appartenant à l'ensemble.
  2. admet un neutre, le 0, tel que a + 0 = a = 0 + a
  3. est associative: pour tout a, b et c appartenant à Z, (a + b) + c = a + (b + c): si je dispose de trois tas d'éléments, je peux d'abord agréger les deux premiers puis ce résultat au troisième ou agréger le premier à l'agrégation des deux derniers.
  4. contient des opposés pour chaque nombre: Z comprend un opposé pour chacun de ses éléments, dont l'addition donne l'élément neutre: a + a = 0. 0 est son propre opposé.

Le fait pour un ensemble muni d'une opération d'être un groupe permet d'être sûr de pouvoir obtenir une solution à une équation. Il existe une propriété supplémentaire, non obligatoire:

On dit alors que Z muni de l'addition est un groupe commutatif.

Notes

Ces cinq conditions peuvent paraître évidentes, mais sachez que

Ces considérations permettent de renoncer à la soustraction comme opération, même si elle peut faciliter l'écriture. 3 – 5 est plus court que 3 + 5.

Enfin, N muni de l'addition (N,+) n'est pas un groupe, puisque 0 est le seul élément qui possède un opposé, lui-même. Par ailleurs, nous avons vu que toutes les équations ne sont pas solubles dans l'ensemble N.

Un clin d'œil à mon prof de math de collège qui a introduit la notion de groupe par le contre-exemple que constitue l'addition dans N.

C'est ce qu'on appellerait auourd'hui un teasing. Je doute que cela ait eu un effet positif sur l'apprentissage des mathématiques pour beaucoup d'élèves.