Les évangiles apocryphes

En cours d'écriture.

LES évangiles qui n'ont pas été retenus pour figurer dans le canon chrétien sont dit apocryphes. Ils n'en ont pas moins influencé les croyances chrétiennes, surtout concernant l'enfance de Jésus et le culte marial.

Sources:

Le Protévangile de Jacques

L'écrit a été appelé Protévangile (l'évangile d'avant les autres) car il est tourné sur l'annonciation, la naissance et la vie de Marie, en ce compris la naissance de Jésus, que seuls deux évangiles canoniques (Matthieu et Luc) mentionnent.

Il commence par une histoire qui tient de l'histoire d'Abraham et Sara, qui donnent jour à Isaac à 100 et 90 ans (Gn 17-21), et de celle de Zacharie et Élisabeth, stériles mais qui donneront naissance à Jean le baptiste (Lc 1:5-17): Joachim n'a pas de descendance, ce qui est une grande faute et l'oblige à consacrer ses offrandes après les autres. Finalement, l'ange se manifeste à Anne, qui concevra Marie.

Virginité mariale

Le Protévangile de Jacques semble écrit afin de magnifier la pureté de la Marie. Et qui dit pureté signifie semble-t-il virginité, même après l'accouchement: la sage-femme invite une certaine Salomé pour constater la virginité de jeune mère: «Marie se disposa. Et Salomé mit son doigt dans sa nature […]» (Prot. 20:1).

Sainte Anne et saint Joachim

Il ne s'agit cependant pas d'un conte trivial refusé par l'Église: c'est dans cet écrit que l'on apprend que les parents de Marie s'appellent Anne et Joachim. Alors que ces deux noms n'apparaissent nulle part dans la bible chrétienne, il existe des églises, écoles et hôpitaux consacrés à sainte Anne, et dans une moindre mesure, à saint Joachim.

Naissance dans une grotte

L'accouchement a eu lieu dans une grotte (Prot. 19), endroit inconnu des deux canoniques de l'enfance, dont l'un opte pour une crèche (Lc 2:7), l'autre ne précisant rien, parlant juste de «logis» lors de la visite des mages (Mt 2:11). Une tradition représentant la crêche dans une grotte perdure chez des catholiques.

L'Immaculée Conception

Comme pour la mère de Jésus et celle de Jean le baptiste, la mère de Marie ne peut avoir d'enfants, et c'est un ange qui vient les prévenir qu'Anne va enfanter. Ce rapprochement entre la naissance annoncée de Jésus et celle de sa mère a conféré à Marie une sainteté grandissante, jusqu'à lui reconnaître son exemption de péché originel, promulguée dogme de l'Immaculée Conception par Pie IX en 1854 (bulle Ineffabilis Deus). Ce pape convoquera ensuite Vatican I (1869-1870) où il impose le dogme de l'infaillibilité pontificale.

Cette divinisation progressive de Marie atteint son apogée en 1950 quand Pie XII, usant de l'infaillibilité papale, instaure officiellement la fête de l'Assomption : c'est corporellement que Marie quitte le monde (épisode inconnu du Nouveau Testament), à l'instar de l'Ascension de Jésus (Mc 16:19, Lc 24:51, Ac 1:2).

Évangile arménien de l'Enfance

Melchior, Balthazar et Gaspard

Matthieu est le seul évangéliste canonique à parler de mages venus d'Orient pour adorer Jésus nouveau-né, leur apportant trois présents hautement symboliques: or, encens et myrrhe (Mt 2:11). C'est l'Évangile arménien de l'Enfance qui mentionnent le nombre trois et les noms Melchior, Balthazar et Gaspard, repris dans la tradition populaire comme «Rois-mages» en France, et tout simplement «Los Reyes» en Espagne.

Histoire de Joseph le Charpentier

Matthieu seul mentionne la profession du père de Jésus: «Celui-là n'est-il pas le fils du charpentier?» (Mt 13:55), alors que Marc, qui comme Jean ignore totalement Joseph, attribue cette profession à Jésus: «Celui-là n'est-il pas le charpentier?» (Mc 6:3). Luc, qui parle de Joseph, ne mentionne pas sa profession. L'Histoire de Joseph le charpentier poursuit donc probablement la tradition de Matthieu.

Un vieux Joseph

Joseph est bien plus vieux que Marie – il meurt à 111 ans dans cette histoire –, et cela se retrouve dans beaucoup de représentations de Joseph. Cela est nullement précisé dans les canoniques ni dans les Actes des Apôtres, mais reprend l'idée d'Abraham qui conçut vers cent ans, et permet de comprendre le «respect» de Joseph pour Marie.

D'abord désigné protecteur jusqu'au mariage de Marie la pure, il reçoit la visite de l'ange qui lui permet de «rec[evoir] Marie près de lui.» (Hist. 6) comme seul Matthieu l'a indiqué (Mt 1:16), ce qui rapproche encore une fois Joseph d'Abraham (Gn 16), sauf que c'est Yahvé qui se charge d'informer de dernier.

Les frères de Jésus

Cet évangile contient aussi une justification de la présence de frères de Jésus, encombrants pour la plupart des catholiques: en fait, Joseph avait simplement quatre fils et deux filles d'un premier mariage (Hist. 2), Jésus serait donc leur demi-frère adoptif. Inutile donc de hasarder que «frères» signifie en fait «cousins» : le grec, langue des évangiles, distingue clairement les deux catégories familiales.

Pseudo-Thomas

L'évangile du Pseudo-Thomas fournit quelques anecdotes de la vie de Jésus entre cinq et douze ans, basés sur des miracles anodins ou capricieux, allant jusqu'à dessécher ou ôter la vie de condisciples qui s'opposent à lui, frapper de cécité ou tuer des personnes qui se plaignent de ses vilénies. Mais il finit toujours par les guérir ou les ressusciter, et il s'assagit jusqu'à sa fugue au temple et la leçon qu'il donne aux docteurs de la Loi comme chez Luc (Lc 2:46).

Cet apocryphe reprend deux vers de l'Ave Maria (les scribes et les Pharisiens, lors de son escapade à douze ans): «Tu es heureuse parmi les femmes, car Dieu a béni le fruit en ton sein.» (Pseud. 19.4), également trouvé dans Luc (c'est sa «parente» Élisabeth qui parle): «Bénie es-tu entre les femmes, et béni le fruit de ton sein! (Lc 1:42), ce qui est très proche de la prière catholique à Marie, lAve Maria :

Vous êtes bénie entre toutes les femmes et Jésus,
le fruit de vos entrailles, est béni.


D'autres écrits paléo-chrétiens qui ne sont pas des évangiles sont également déclarés apocryphes. Bien que non retenus par l'Église, ils l'ont également influencée.

Les Actes de Pierre

Écrit communément situé aux environs de 200, mais dont la reconstitution à partir d'autres textes partiels semble relativement complète et fiable. La première partie se passe en Palestine, la seconde parle de sa vie à Rome. C'est sur la base de cette dernière partie que Henryk Sienkiewicz (1846-1916, Nobel de littérature en 1905) a écrit son roman Quo vadis? (1896).

Ces Actes ont fortement influencé l'Église naissante: Simon le Magicien ayant voulu acheter le pouvoir de faire des miracles, elle appelle simonie tout achat de bien spirituel ou de charge ecclésiale ; un épisode semblable se trouve dans les Actes des Apôtres en 8:9-24. On y trouve une bataille de miracles: Simon le magicien ayant utilisé la magie pour s'envoler, Pierre l'a fait tomber en invoquant le nom de Jésus.

On y trouve enfin la rencontre de Pierre avec Jésus qui le convainc de ne pas s'enfuir de Rome («Quo vadis?», où vas-tu?), ainsi que la mention d'un crucifiement de Pierre la tête en bas, s'estimant indigne de mourir comme le Christ.

Le Pasteur d'Hermas

À suivre…