La géographie selon les évangiles

MÊME l'histoire présentée comme historique, la plus vendue au monde, peut témoigner d'une géographie incertaine. Cana, Nazareth, Emmaüs peuvent être connus par tous les chrétiens, il n'est pas du tout évident de savoir où se situaient ces bourgs il y a deux mille ans.

Le pays [carte]

Selon l'archéologue Israël Finkelstein et l'historien et archéologue Neil Asher Silberman, les tribus du sud (Judas et Benjamin) se distinguaient des dix autres tribus, appelées Israël. Les deux livres des Rois auraient d'ailleurs été écrits pour expliquer pourquoi les dix tribus du nord, ne suivant pas la loi mosaïque avec la piété qui convenait, ont été déportées par Nabuchodonosor (avant celles du sud).

Toujours est-il qu'il y a deux mille ans, la Palestine étaient divisée en trois régions, la Judée au sud (au niveau de la Mer Morte), la Galilée au Nord (au niveau de la Mer de Galilée, ou Lac de Tibériade ou de Genézareth), et la Samarie entre les deux.

La Judée

Avec Jérusalem comme capitale et le Temple unique, les Judéens se disaient les dépositaires de la religion la plus orthodoxe.

La Galilée

Les Galiléens étaient dépréciés par les Judéens, parfois appelés «Juifs» dans les évangiles. Jean évoque cette discrimination en au moins trois endroits: «Peut-il venir de Nazareth quelque chose de bon?» (Jean 1:46) - «Est-ce bien de la Galilée que doit venir le Christ?» (Jean 7:41) - «Examine, et tu verras que de la Galilée il ne sort point de prophète» (Jean 7:52).

La Samarie

Les incessants voyages de Jésus et ses apôtres entre la Galilée et la Judée les obligent à passer de temps en temps par la Samarie (ils peuvent néanmoins passer par l'est du Jourdain, qui appartient au nord à la Décapole et au sud à la Pérée).

Les évangiles semblent fortement déconsidérer les Samaritains. Jean énonce le passage par la Samarie comme une fatalité: «Comme il fallait qu'il passât par la Samarie, il arriva dans une ville de Samarie, nommée Sychar» (Jean 4:4-5). Jésus y demande de l'eau à une Samaritaine, qui s'étonne: «Comment toi, qui es Juif, me demandes-tu à boire, à moi qui suis une femme samaritaine?» (Jean 4:9). Plus loin, les Juifs traitent Jésus de Samaritain qui a un démon (Jean 8:48).

Lors d'un premier missionnement des apôtres selon Matthieu, Jésus recommande tout simplement aux apôtres de ne pas entrer «dans les villes des Samaritains, allez plutôt vers les brebis perdues de la maison d'Israël.» (Matthieu 10:5-6), tandis que Luc rapporte que les apôtres demandent à Jésus s'il faut faire descendre le feu du ciel sur un bourg de Samaritains qui ne voulaient pas les héberger (Luc 9:52-54).

Chez Luc encore, sur dix lépreux qu'il a guéris en bordure de la Samarie, un seul – et un «étranger»! – vient se prosterner devant Jésus (Luc 17:11-19) ; chez Luc toujours, Jésus dit préférer un Samaritain qui a de la compassion à un prêtre et à un lévite insensibles au malheur d'un voyageur tombé dans une embuscade (Luc 10:30-37) ; il en est resté l'expression «bon samaritain», montrant à rebours que c'est exceptionnel.

Ces comparaisons montrent à l'évidence le peu de considération qu'on portait aux habitants de Samarie, censés pourtant descendre de tribus d'Israël.

Les localités [carte]

Arimathie

Ce lieu n'est connu que par le nom Joseph d'Arimathie, mentionné une seule fois par chacun des quatre évangiles canoniques (Matthieu 27:57, Marc 15:43, Luc 23:51, Jean 19:38). Le nom d'un lieu «Arimathie» semble ne jamais avoir été mentionné dans la littérature antique ou par l'archéologie. Mais si ἀρι- «ari» est une particule marquant une idée de force, de supériorité, et si μάθος «mathos» signifie connnaissance (et μαθητής «mathētēs», disciple), il est peut-être vain de vouloir chercher une bourgade au nom sémitique.

A. Bailly, Dictionnaire grec-français, Hachette, 36e éd., 1980

Béthanie

Dans la plupart des localisations, Béthanie se situe à côté Jérusalem (Marc 11:11, Matthieu 21:17, Luc 24:50), et plus précisément près du Mont des Oliviers (Marc 11:1, Luc 19:29). C'est là que Jésus ressuscite Lazare (Jean 11:1-45), à 15 stades (3km) de Jérusalem (Jean 11:28), et qu'il se laisse verser du parfum sur la tête par la pécheresse chez le même Lazare (Marc 14:1-9, Matthieu 26:1-13). Pour Jean, il s'agit de Marie, sœur de Marthe et fille de Lazare (Jean 12:1-8), et pour Luc l'hôte est «un pharisien».

C'est également là (selon Jean) ou près de là (selon Marc et Luc) que se passe l'entrée triomphale à Jérusalem. Selon Marc, c'est en sortant de Béthanie que Jésus dessécha le figuier qui ne portait pas de fruit (Marc 11:12 et 20-25).

C'est enfin là que, pour Luc, Jésus «fut emporté au ciel» (Luc 24:50-51).

Jean parle d'un autre lieu du même nom «au delà du Jourdain, où Jean baptisait» (Jean 1:28), de façon très imprécise : il y a environ 100km de distance à vol d'oiseau entre la Mer de Galilée et la Mer Morte. Pour Marc, ce sont tous les habitants de Judée et de Jérusalem qui viennent s'y faire baptiser (Marc 1:5) ; Matthieu y ajoute «tout le pays des environs du Jourdain» (Matthieu 3:5), ce qui est encore moins précis.

Jean semble s'accorder avec ces deux synoptiques puisque des sacrificateurs de Jérusalem viennent s'enquérir de l'identité du baptiste (Jean 1:19) et précise que le lieu est Béthanie (Jean 1:28). Cela se complique lorsque le lendemain au même endroit, Jean le baptiste reconnaît Jésus et que celui-ci choisit ses quatre premiers disciples: André, Pierre et Philippe, de Bethsaïde, et Nathanaèl (Jean 1:35-51), dit ensuite «de Cana» (Jean 21:2). Il s'agit de Galiléens ne se connaissaient pas (sauf les deux frères André et Pierre) mais qui se sont rencontrés près de Jérusalem, puis que l'on retrouve trois jours plus tard à Cana en Galilée (Jean 2:1).

Le 3 juillet 2015, l'UNESCO a inscrit le site de «Béthanie au-delà du Jourdain» (Jordanie) à la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO. Le site est situé à 9 km de la Mer Morte.

Le reste du Nouveau Testament ignore ces deux localités.

Bethsaïde

Ville construite vers 30ÈC par Hérode Philippe II, au nord du lac de Tibériade, près de l'embouchure du Jourdain. Avec Chorazeïn (seulement nommée à cette occasion) et Capharnaüm, elle est l'objet d'imprécations par Jésus pour ne pas avoir cru en lui lorsqu'il y faisait des miracles (Matthieu 11:21-24, Luc 10:13-16).

Selon Luc, c'est là qu'a eu lieu le miracle de la multiplication des cinq pains et deux poissons (Luc 9:10-17). Selon Marc, c'est alors que leur barque allait dans cette direction que Jésus rejoignit les apôtres en marchant sur les eaux (Marc 6:45-53) ; Jésus y guérit plus tard un aveugle (Marc 8:22-26). Pour Jean, le disciple Philippe est de Bethsaïde (Jean 12:21), ainsi qu'André et Pierre (Jean 1:44).

Cana

Ce lieu n'a jamais été rapporté dans l'Ancien Testament. Dans la bible chrétienne, il n'y a que Jean qui parle directement de Cana qu'il situe en Galilée, à propos du miracle de la transformation de l'eau en vin, «premier miracle de Jésus» que les autres évangiles ignorent. Le même évangile reitère ensuite «Cana en Galilée» (Jean 4:46) où il situe l'origine de Nathanaèl (Jean 21:2). Jean cite quatre fois la ville, et à chaque fois dans la locution «Cana en Galilée».

Les ruines de Khirbet Qana, au sud de la Galilée, restent un emplacement hypothétique du Cana de Jean, le wikipedia anglophone étant pour le moins imprécis concernant la période d'occupation : «from the Hellenistic to the Early Arab period.»

Lors de la nomination des Douze, Matthieu et Marc citent en onzième place un Simon le Cananéen (Matthieu 10:4, Marc 3:18), que Luc semble situer en dixième place sous le nom de Simon le zélote (Luc 6:15). Par ailleurs, Matthieu appelle cananéenne (Matthieu 15:21-28) et Marc «syrio-phénicienne» (Marc 7:24-30) une femme rencontrée par Jésus lorsqu'il se retire dans le territoire de Tyr et de Sidon, clairement au nord-ouest de la Galilée, ce qui est plus compatible avec la situation actuelle Qana, à plus de 60km au nord-ouest de la mer de Galilée (à 25km de Tyr), ville sur laquelle différentes versions de wikipedia n'ont aucune idée de la datation.

Note : dans l'Ancien Testament, le pays de Canaan, où vivent les Cananéens, est la terre promise, à savoir la Palestine, le liban, une partie de la Syrie et l'ouest de la Jordanie. C'est le pays dévolu à Canaan, maudit parce que son père, Cham, vit la nudité de son propre père, Noé, qui s'était enivré puis endormi (Genèse 9:20-25). Il reste à expliquer pourquoi l'expression se serait bornée au pays de Tyr et de Sidon au temps des évangiles.

Le reste du Nouveau Testament ne mentionne pas cette localité.

Capharnaüm [carte]

Capharnaüm est un lieu qui revient assez souvent dans les quatre évangiles : (4-3-4-5), le deuxième lieu le plus cité après Jérusalem (13-12-31-13). Matthieu (Matthieu 9:1) et Marc (Marc 2:1) affirment que Jésus y était installé. Lors de la première apparition du lieu, Matthieu ne fait que rapporter une prophétie (Matthieu 4:14) où le nom n'apparaît pas ; Marc et Luc parle de l'étonnement face à l'enseignement de Jésus et la stupeur face à son exorcisme (Marc 1:22, Luc 4:32), tandis que Jean en parle comme un court séjour de Jésus, sa mère et sa fratrie après les noces de Cana (Jean 2:12). Marc place l'épisode après le recrutement des premiers apôtres, Matthieu et Luc avant.

Matthieu, Luc et Jean situent Capharnaüm comme lieu de guérison du serviteur du centurion ou de l'officier du roi (Matthieu 8:5-13, Luc 7:1-10, Jean 4:46-54), mais pour le reste, seul Marc précise que la guérison du paralytique se fait à Capharnaüm (Marc 2:1), Matthieu parlant de la ville de Jésus (Matthieu 9:1). Matthieu et Luc citent encore Capharnaüm lors d'une malédiction de Jésus sur la ville (Matthieu 11:23, Luc 4:23). Les autres références sont uniques chez chaque évangile, notamment dans un épisode connu de Jean seul : lors du prêche sur le pain de vie (Jean 6:24sq).

L'archéologie attesterait une occupation de l'endroit à partir du Ve avant l'ère commune, mais le lieu n'est pas nommé dans la bible hébraïque. Cet endroit, qui apparaît seize fois dans les évangiles canoniques, n'est pas cité dans le reste du Nouveau Testament, les Actes des Apôtres et les épîtres ignorant quasi tout de la vie terrestre de Jésus.

L'explication des sens «désordre» et «débauche» du nom commun «capharnaüm» est habituellement expliqué par la guérison du paralytique, où la foule se massait autour de la maison de telle façon qu'il a fallu faire passer le grabataire par le toit. Selon la Larousse, c'est parce qu'il s'agissait d'une grande ville de commerce, mais rien dans l'évangile n'en parle.

Le nom signifierait «village de la consolation». Ceux qui voient le gnosticisme parmi les premières sources du christianisme rapportent le sens proposé par Héracléon ; «Par Capharnaüm sont désignées les parties inférieures du monde, la matière vers laquelle [le Christ] est descendu.» Par opposition, Jésus serait «monté» à Jérusalem pour y mourir.

Georges Ory, «Analyse des origines chrétiennes», Cahiers du Cercle ernest Renan n°38, 2e trim. 1963, p89

Chorazeïn

Ville à la localisation incertaine, citée uniquement avec Bethsaïde et Capharnaüm lors de l'imprécation aux villes (Matthieu 11:21-24, Luc 10:13-16).

désert

Dans les évangiles, le désert est, avec la montagne, un lieu générique, pour ne pas dire passe-partout.

La figure de Jean le baptiste est fortement associée au désert. Dans le récit de l'enfance de Luc, l'annonciateur de Jésus vit dans les déserts jusqu'à sa présentation à Israël. Peu avant le baptême de Jésus), les quatre évangiles canoniques le présente qui prêche, voire «crie dans le désert» (Matthieu 3:1-3, Marc 1:3, Luc 3:4, Jean 1:23). Marc le fait même baptiser dans le désert (Marc 1:4).

Après son baptême, Jésus est emmené par l'Esprit dans le désert pour y être tenté par le diable durant quarante jours. Ensuite, c'est souvent pour échapper à la foule qu'il s'y rend. Ayant guéri une foule de démoniaques, il se lève très tôt pour filer dans un lieu désert. Découvert, il explique qu'il doit également aller dans d'autres villes. Il repart dans des «lieux déserts» après la grande rénommée acquise pour avoir guéri un lépreux (Marc 1:35-39,45, Luc 4:42-44, 5:15-16).

N'ayant pu échapper à la foule, la première multiplication des pains a lieu dans un désert pour les synoptiques (Matthieu 14:13-21, Marc 6:31-44, Luc 9:10-17), sur une montagne pour le quatrième évangile (Jean 6:1-13). La seconde, connue des seuls Matthieu et Marc, a également lieu dans un désert (Matthieu 15:32-39, Marc 8:1-10).

Jamais ces désert ne sont situés. Par contre, Jean situe Ephraïm comme étant voisine du désert (Jean 11:53), comme si un désert situait mieux une ville qu'une ville ne situe un désert.

Le désert est parfois utilisé dans les rappels de la Bible, comme Moïse et la traversée du désert (Jean 6:31), ou dans les paraboles, comme celle où un berger y délaisse son troupeau pour partir à la recherche de la brebis perdue (Matthieu 18:12, Luc 15:4). Cela relativise un peu la notion de désert, car il ne semble pas très avisé de faire paître des brebis dans un désert au sens strict.

Emmaüs [carte]

Seul Luc parle de cet endroit, vers lequel deux pèlerins anonymes se déplacent après la mort de Jésus ; Marc se borne à parler de deux disciples qui sont en chemin pour la campagne (Marc 16:12-13) sans nommer l'endroit, et de plus dans sa «fin longue» (Marc 16:9-18), inconnue des codex sinaïticus et vaticanus (IVe).

Dans la bible hébraïque, seul le premier livre des Macchabées cite trois fois le sud d'Emmaüs situé dans le Bas Pays (1 Macchabées 3:40) comme lieu de campement militaire (1 Macchabées 3:57 et 4:3), une quatrième fois précisant que Bacchidès, général syrien, en fait un lieu fortifié (1 Macchabées 9:50).

Flavius Josèphe précise que la place fut incendiée par les Romains en 4 avant notre ère (Guerre des Juifs, Livre II, IV-1 et V-1). Caligula la renomma Nikopolis en 37. Le site archéologique est situé à une trentaine de km à l’ouest de Jérusalem, ce qui porterait le stade à 500m, ce qui est incompatible avec l’éloignement de Béthanie (quinze stades pour moins de trois km). Une légion romaine y campe lors de la guerre qui se terminera par la prise de Jérusalem en 70. La place aurait à ce moment été dévastée, et c'est peut-être alors qu'Emmaüs est devenu le village dont Luc parle.

Flavius Josèphe parle également d'un Emmaüs à proximité de Tibériade, ville nouvellement construite par le tétrarque Hérode sur le lac de Gennésareth, en Galilée (Antiquités judaïques, XVIII-II-3).

Gadara ou Gérasa

Après l'apaisement de la Mer de Galilée, Jésus et les apôtres accostent à l'est du Jourdain, sur le rivage des Gadaréniens (Marc 5:1 pour Segond 1910, Matthieu 8:28 pour la Bible de Jérusalem) ou des Géraséniens (Marc 5:1, Luc 8:26 et 8:37 pour la Bible de Jérusalem et Luc 8:26 et 8:37 pour Segond 1910) : cela dépend de la traduction et du synoptique – pour expulser les esprits d'un démoniaque selon Marc et Luc (Marc 5:1-20, Luc 8:26-39) ou de deux selon Matthieu (Matthieu 8:28-34). Gadara est censée se situer à 5 Km du rivage, mais si Gérasa se rapporte à l'actuel Jerash, la ville est bien plus lointaine, et on peut se demander ce que font Jésus et les apôtres aussi loin de Galilée ou de Judée.

Lac de Tibériade

Également appelé Lac de Gennésareth, voire Mer de Galilée, il s'agit d'un lac d'eau douce de 20km sur 15, situé à l'est de la Galilée. Jésus y recrute ses premiers apôtres, y marche sur les eaux, y effectue deux pêches miraculeuses, y calme la tempête, s'y échappe lorsque la foule se fait trop pressante…

Magdala

Bien qu'aucune localité de ce nom soit mentionnée dans l'Ancien Testament, un petit village du nom d'al-Majdal a existé jusqu'en 1948 près du lac de Tibériade, ce qui pourrait correspondre avec ce qu'en dit Matthieu, qui parle des femmes «ayant accompagné Jésus depuis la Galilée», dont Marie de Magdala (Matthieu 27:55-56).

Il est question d'une Marie de Magdala, qui parmi d'autres femmes, «regardait de loin» l'agonie de Jésus (Matthieu 27:55-56, Marc 15:40), ou se tenait près de la croix (Jean 19:25). La même est présente lors de l'ensevelissement (Matthieu 27:61, Marc 15:47), ainsi que devant le tombeau vide deux jours plus tard (Matthieu 28:1, Marc 16:1, Luc 24:10, Jean 20:1). Nous apprenons chez Luc (Luc 8:2) que Jésus lui avait chassé sept démons, ce qui n'est confirmé que dans la «fin longue» de Marc (Marc 16:9).

Cette Marie de Magdala n'a par contre rien à voir avec la pécheresse anonyme ayant oint Jésus de parfum (Matthieu 26:6-13, Marc 14:3-9, Luc 7:36-39), à Béthanie (seul Luc ne le précise pas), que Jean affirme être Marie, sœur de Marthe (Jean 12:1-8), toutes deux filles de Lazare chez qui cela se passe. Pour les Marc et Matthieu, l'hôte est Simon le lépreux ; pour Luc un pharisien nommé Simon (Luc 7:40).

Mer de Galilée

L'appelation «mer» est exagérée pour ce qui n'est qu'un lac d'eau douce (l'expression «eau de mer» désigne explicitement de l'eau salée). Voir Lac de Tibériade.

Mer Morte

Cette mer n'est jamais mentionnée dans le Nouveau Testament. Cela est peut-être étonnant dans la mesure où le «Béthanie au delà du Jourdain», où Jean baptisait et reconnu à ce titre par l'UNESCO, est situé à neuf kilomètres au nord de la Mer Morte, assez proche de l'embouchure.

L'Ancien Testament parle le plus souvent de la (mer) Araba (Deutéronome 4:49, Josué 8:14), parfois de la mer salée (Nombres 34:3, 34:12, Josué 15:2, Josué 15:5), parfois en association (Deutéronome 3:17, Josué 3:16, Josué 12:3). Ces mentions, souvent associées au Jourdain, servent presque toujours à délimiter le territoire d'Israël : l'identification ne fait aucun doute. Les évangiles n'avaient probablement pas la nécessité de mentionner la Mer Morte, mais le fait que Jésus (pour Jean) soit passé à Béthanie au delà du Jourdain aurait dû lui permettre de la longer. De plus, un lieu inhospitalier comme le désert est mentionné 35 fois dans les quatre évangiles.

Il semble que des communautés d'esséniens vivaient à proximité de la Mer Morte, mais l'essénisme n'est jamais mentionné par les évangiles alors qu'il l'est par Philon, Pline et Josèphe, trois auteurs majeurs du Ier siècle de l'Ère Commune.

Mont des Oliviers

Le mont des Oliviers avait déjà été mentionné en Jean lors du pardon conféré à la femme adultère, mais ce passage, connu de Jean seul, n'existe pas dans les manuscrits complets les plus anciens, les Codex Sinaiticus et Vaticanus, qui datent du IVe siècle.

Cet endroit fait une entrée assez tardive dans l'évangile, avec l'épisode de l'entrée à Jérusalem (les rameaux), en Matthieu 21:1 (sur 28 chapitres), en Marc 11:1 (sur 16), Luc 19:29 (sur 24) et Jean 12:9 (sur 21). Ce lieu est associé à Bethphagé et Béthanie chez Marc et Luc, à Bethphagé seulement chez Matthieu. Jean ne parle que de Béthanie.

Il est encore mentionné lors de l'annonce de la fin des temps que ne mentionnent que les synoptiques (Matthieu 24:1ss, Marc 13:1ss, Luc 21:15ss), lors du serment de Pierre (Matthieu 26:30, Marc 14:26, Luc 22:31, Jean 13:36), puis lors de la veille juste avant l'arrestation, où Luc précise qu'il s'agit du mont des Oliviers où Jésus avait ses habitudes (Luc 22:39), tandis que les deux autres synoptiques parlent de Gethsémané, qui signifierait «Pressoir à huile» (Matthieu 26:36, Marc 14:32). Jean ne parle à ce moment que d'un jardin «de l'autre côté du Cédron», alors qu'il a déjà mentionné plusieurs fois le Mont des Oliviers.

montagne

La montagne, parfois haute, est avec le désert un lieu très imprécis dans les évangiles. Il ne s'agit pas seulement de la montagne des paraboles, qui peut signifier un lieu dangereux, mais des endroits que Jésus gravit.

Lors de la seconde tentation par Satan, Jésus est transporté par le diable sur une montagne très élevée (Matthieu 4:8) – ou un lieu simplement élevé (Luc 4:4) –, d'où il peut contempler tous les royaumes du monde. La tradition a retenu le mont Quarantania (350m).

Dans un passage connu de Luc seul, Jésus se rend à Nazareth où son prêche dans une synagogue est très mal reçu : l'assemblée veut le jeter de la montagne où la ville était bâtie (Luc 4:16-30), détail qui n'apparaît jamais dans les autres mentions de ce lieu.

C'est sur une montagne que Jésus prie avant de nommer ses douze apôtres (Marc 3:13-19, Luc 6:14-15), il redescend avec eux sur un plateau pour de nombreuses guérisons et son discours sur les béatitudes (Luc 6:17ss), alors que Matthieu, pour qui le choix des apôtres s'est fait plus tard, fait monter Jésus pour échapper à la foule et enseigner ses disciples (Matthieu 5:1). Avant que Jésus ne marche sur les eaux, Jean parle également de la montagne comme un lieu pour échapper aux gens (Jean 6:14-15).

Il y a aussi cette étrange histoire de pourceaux qui paissent dans la montagne (Marc 5:11, Luc 8:32), dans lesquels Jésus transfère les esprits impurs ensuite précipités dans la mer par les pentes escarpées (Matthieu 8:32, Marc 5:13, Luc 8:33), ce qui ne semble pas compatible avec la géographie de la région s'il s'agit du sud du lac de Tibériade.

La multiplication des pains commune aux quatre évangiles (pas le doublet chez Marc et Matthieu) se passe sur une montagne selon Jean (Jean 6:1-13) mais dans un lieu désert chez les synoptiques (Matthieu 14:13-21, Marc 6:31-44, Luc 9:10-17). La transfiguration, que Jean ne mentionne pas, a lieu sur une montagne (Luc 9:28-36), que les deux autres synoptiques qualifient de haute (Matthieu 17:1-9, Marc 9:2-10).

Enfin, la séparation de Jésus ressuscité se fait chez Matthieu sur la montagne de Galilée désignée par Jésus, que l'évangile ne nomme pas. Chez Luc au contraire, l'Ascension se passe près de Jérusalem. On ne peut que le supposer chez Marc. Jean ne parle nullement de séparation.

La plus haute montagne de Galilée est le mont Méron (1208m), au nord-ouest du lac de Tibériade. Il n'est pas cité dans les évangiles ni le reste du Nouveau Testament et semble inconnu de l'Ancien. Le mont Thabor, retenu par la tradition, culmine à 588m et domine la plaine de 450m.

Le point culminant des Monts de Judée est le mont Halhoul (1026m).

Naïn [carte]

Seul Luc parle de ce lieu, ville de Galilée où Jésus ressuscite le fils d'une veuve (Luc 7:11-17). Il ne se trouve nulle part ailleurs dans la Bible. Un lieu appelé Naïm existe actuellement à quelques kilomètres au sud de l'actuel Nazareth. Le cinquième chapitre du premier livre des Macchabées parle par trois fois d'un Karnaïn.

Nazareth

Contrairement à la traduction de Segond, les plus récentes, comme celle de l'École biblique et archéologique de Jérusalem (pdf 7,5Mo), n'utilisent pas systématiquement l'appellation «Jésus de Nazareth» (Matthieu 21:11, Luc 2:39, Jean 1:45, Ac 10:37), mais plus souvent «Jésus le Nazarénien» (Marc 1:24, 10:47, 14:67 et 16:6, Luc 4:34 et 24:19), ce qui peut s'expliquer par le fait que «Nazareth» est parfois remplacé par «Nazara» (Matthieu 4:13, Luc 4:16).

Dans cette même traduction, la mention «Jésus le Nazôréen» (Matthieu 2:23, Matthieu 26:71, Luc 18:37, Jean 18:5, 7 et 19:19), reprise plusieurs fois dans les Actes des Apôtres, (Actes 2:22, 3:6, 4:10, 6:14, 22:8, 26:9) pour un seul «Nazareth» dans l'expression «Jésus de Nazareth» (Actes 10:37), renverrait pour les Actes au «parti des Nazôréens» (Actes 24:5).

Il existait par ailleurs le naziréat, un temps que les Nombres décrit comme consacré à Dieu (Nb 6:1-21) ; la future mère de Samson, stérile, est visitée par l'ange de Dieu qui lui dit que son fils sera naziréen dès le sein de sa mère jusqu'au jour de sa mort.

Le Nazareth contemporain ne semble pas être l'endroit auquel les deux évangiles de l'enfance font référence. Inconnu du reste du Nouveau Testament, la première mention de ce nom daterait du IIe siècle de notre ère ; nul n'a identifié par ailleurs l'emplacement de la falaise d'où Jésus aurait dû être jeté (Luc 4:28-30).

Sidon » Cana [carte]

Sychar

Seul Jean parle de ce lieu, ville de Samarie où Jésus s'entretient avec une Samaritaine qui a eu cinq maris.

Tyr » Cana

Tabor ou Thabor

Mont culminant à 588m qui se situe au sud-ouest du Lac de Tibériade, où la tradition situe la transfiguration et, bien que cet endroit ne soit nullement mentionné dans le Nouveau Testament. Plusieurs livres de l'Ancien Testament mentionnent le mont Tabor, souvent en relation avec les tribus du nord.

Tibériade [carte]

Ville construite en 26ÈC par Hérode Antipas, nommée de la sorte en l'honneur de l'empereur Tibère (42AÈC-37ÈC).

L'Ancien Testament utilise «Kinnérèt» (Nombres 34:11, Deutéronome 3:17, Josué 13:27), ville en Josué 19:35 et région en 1 Rois 15:20, ou Kinnerot (Josué 11:2, 12:3) ou Gennèsar (1 Macchabées 11:67). Le nom vient de la ville du même nom, mais certains font découler le nom du lac du luth hébraïque, le kinnor, qui rappelle sa forme.

Le site fut occupé durant les âges du bronze et du fer (sans plus de précision), mais cette discrétion empêche de savoir si la ville existait encore au début de notre ère.

Dans le Nouveau Testament, seul les synoptiques en font mention : Luc mentionne le bord du lac de Gennésaret (Luc 5:1), Marc et Matthieu le pays de Gennésaret (Matthieu 14:34, Marc 6:54).

L'appellation «Lac de Tibériade» n'a probablement pas utilisée tout de suite après la construction de la ville. Jean mentionne une seule fois la ville :

Les autres fois mentionnent seulement le lac :

Deux synoptiques utilisent également «Mer de Galilée» (Matthieu 4:18 et 15:29, Marc 1:16 et 7:31). Jean la mentionne également, mais en alternative avec la mer de Tibériade (Jean 6:1).